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Bouc émissaire : ne passez pas à côté du pourquoi

Bouc émissaire : quand on tient le coupable, plus de problèmes !

« Si ça ne marche pas, c’est à cause de Michel/des commerciaux/du marketing/des assistantes… »

Lorsque j’interviens pour coacher des équipes, dans 95% des cas, les raisons du problème sont claires pour les intéressés :

  • il est nul,
  • il perturbe l’équipe,
  • c’est sa faute s’il y a des retards,
  • c’est à cause de lui qu’il y a une mauvaise ambiance,
  • il ralentit le processus et diminue notre qualité de service…

Et le réflexe primaire c’est de supprimer la cause du problème (en l’occurrence ce pauvre Michel), pour que – miracle – ce problème soit résolu ! Si on ne peut pas virer Michel, a minima, on va essayer de le contourner voire de l’esquiver.

Ça ne vous rappelle rien ? J’ai l’exemple en tête d’une équipe de foot internationale où la seule préoccupation du capitaine était de trouver la taupe mais pas de comprendre pourquoi l’ambiance était délétère…

Au final, on pose un cautère sur une jambe de bois.

Le bouc émissaire ou « les animaux malades de la peste »

Cette fable de Jean de La Fontaine illustre parfaitement le concept de bouc émissaire. Le sujet n’est pas nouveau… Le pauvre âne – qui n’a fait que manger un peu d’herbe tendre dans un pré – finit par endosser le costume de bouc émissaire responsable de la peste. Il a joué le jeu, a avoué son péché ridicule et tous les autres animaux de la Cour, trop heureux d’avoir trouvé un gogo, lui sont tombés dessus à bras raccourcis.

Dans la réalité, devinez ce qu’il advient une fois qu’on s’est séparés de Michel ? Le problème est toujours là. Pire, il s’est aggravé ! Entretemps, cela aura coûté cher à l’entreprise : indemnités, énergie, tensions et réputation. Sans compter la probabilité – non négligeable – que le remplaçant de Michel soit encore « pire » que lui… Étonnant ?

Non.

Ce fonctionnement existe à tous les niveaux de l’entreprise. Parfois ce n’est pas une personne mais une équipe ou un service entier qui devient bouc émissaire. Les chasses aux sorcières s’enchaînent en cascade et prennent toute la structure en otage.

Désigner un bouc émissaire est un réflexe pavlovien

Les exemples de boucs émissaires sont multiples et ils suivent toujours le même schéma. C’est comme un réflexe de Pavlov.

Pourquoi les managers des groupes/équipes/systèmes agissent de la sorte et de manière spontanée ?
C’est un enchaînement simple et rapide : nous avons un problème. Nous avons identifié la cause. La solution est de supprimer cette cause. Point final.

Oui mais non.

En agissant de la sorte, on répond à la question du QUI au lieu de répondre au POURQUOI. La véritable problématique consiste à chercher pourquoi :

  • Pourquoi le système dysfonctionne ?
  • Pourquoi les gens sont sur les nerfs ?
  • Pourquoi la qualité de service est dégradée ?

Il faut également approfondir la réflexion en se posant les bonnes questions :

Quel est le rôle d’un bouc émissaire ?

Concrètement, identifier un bouc émissaire permet d’éviter de se remettre en cause, en tant que personne ou équipe :

  1. C’est une réponse idéale et rapide pour résoudre un problème. C’est même un véritable exutoire pour certains.
  2. Cela permet d’éviter les remises en question. La réponse au problème étant simple et rapide, il est impossible d’aller au fond du problème.
  3. On évite les confrontations. « Je ne parle pas à cette équipe parce que cela évite de se fâcher ». C’est ce qu’on appelle l’évitement amical. Dans un autre registre, on évite de se confronter car cela risque de dégénérer en règlement de compte ou de créer voire renforcer des clans
  4. C’est une façon de garder le pouvoir. Certaines personnes sont encore adeptes de la rétention d’information. « Le savoir c’est le pouvoir ». Ne pas communiquer, c’est conserver le contrôle, alors que c’est justement cette information qui apporterait une piste de solution.

Faire la différence entre la personne et son comportement

Le propos n’est pas de dire que Michel n’a pas un comportement difficile au sein l’équipe. C’est peut-être le cas. En revanche, il est fondamental de faire la différence entre la personne et son comportement.
Seconde étape : comprendre pourquoi Michel agit de la sorte. Qu’est-ce qui provoque les difficultés de ce collaborateur ? Il est possible qu’en réalité il tente de faire au mieux mais manque de moyens pour accomplir sa mission.

Comment éviter cela ?

En tant que responsable d’équipe, vous devez être attentif aux signaux faibles ou forts : un turn over important sur un poste précis, l’arrivée d’un nouveau membre dans l’équipe, des difficultés à communiquer…

Je vous propose 8 idées pour éviter de céder à la facilité :

  1. Provoquer régulièrement des moments de rencontre et de partage de l’information
  2. Permettre à chacun de s’exprimer librement et de manière responsable
  3. Faire fi des a priori
  4. Changer son regard sur les situations bloquées ou admises
  5. Faire le pas de côté pour visualiser la situation dans son ensemble
  6. Contacter un coach ou consultant pour avoir un regard extérieur
  7. Changer de posture : commencer par chercher la solution avant le coupable
  8. Pousser la réflexion et gratter en profondeur

Cette démarche prend du temps et de l’énergie, je vous l’accorde. Mais elle a le mérite d’éviter les dommages collatéraux et – surtout – elle permet de réparer les dégâts !

PS : Je prie les Michel qui liront cet article d’avoir la gentillesse de me pardonner… Il n’y a bien évidemment aucun lien de cause à effet entre la situation et le prénom 😉

Photo de Adi Goldstein sur Unsplash